Jean-Michel Guenassia « À Dieu vat »

Editions Albin Michel

« Quand on n’a pas forcément le choix entre une bonne et une mauvaise solution, il faut sauter dans l’eau glacée, manger et survivre. La vérité, c’est que nous ne prenons jamais de décision contraire à ce que nous sommes, la décision, on la connaît depuis le début, parce que la décision, c’est notre histoire »

                                                                                                           Jean-Michel Guénassia, in « À Dieu vat »

 Du cinéma muet à l’ère de la bombe nucléaire. À Dieu vat est cette épopée française qui va du milieu des années 20 à celui des années 60.

Quarante ans qui voient une génération de jeunes adultes devenir les parents de la génération suivante. Deux générations qui vont connaître tour à tour la 2ème guerre mondiale et celle dite d’Algérie. Quatre décennies qui voient une France se transformer très rapidement.

À Dieu vat  est avant tout l’histoire d’un quatuor de personnages, celui de la jeune génération qui passe de l’état de l’enfance innocente à celui d’adultes, et dont les vies entremêlées nous permettent d’assister aux chassés-croisés de l’amour, radieux, heureux, passionné, secret, déçu….

Une histoire inscrite également dans les bouleversements sociaux de cette époque, avec comme fil rouge le personnage d’Adèle jeune-fille issue d’un milieu fort modeste, mais qui se révélera être une mathématicienne et une scientifique de haut vol ; c’est au prix d’un combat incessant pour pouvoir exercer simplement ses talents hors-norme, qu’elle réussira finalement à accéder aux plus hautes charges dans le milieu – fermé à l’ascension des femmes – de la recherche scientifique.

En brossant cette fresque immense d’un monde qui s’ouvre à ce que deviendra « la modernité », Jean-Michel Guénassia en profite pour faire vivre sous nos yeux, et dans nos cœurs, les figures admirables de ses personnages, ainsi que les destinées que leurs existences tracent tantôt dans la joie, l’insouciance, le drame, voire la tragédie avec cette dimension de l’inexorable accomplissement ou achèvement auxquels préside le Destin.

Enfin, ce vaste roman est une œuvre qui éclaire tous les visages de l’Amour et de sa quête incessante, parfois aboutie, mais si souvent cheminement tortueux, voire douloureux. Jean-Michel Guénassia excelle à décrire la grâce des amours réalisées et la douleur de celles qui sont manquées.

C’est tout cela, au moins, ce très beau roman sur lequel souffle l’esprit de l’Histoire.

Pascal Dober